Fraternité : de l’importance d’une métaphore !
16 OCTOBRE 2025
La fraternité est de toutes les époques ! Toutefois, si elle est la fille de 1789, elle est la mère du Printemps des peuples en 1848 qui la grave aux frontons et la porte à son point d’orgue … jusqu’au fratricide. Est-elle donc tout et son contraire -les pires régimes-, réclament aussi ce terme ? De quel imaginaire tire-t-elle sa puissance ? Quels outils, des images, forge-t-elle pour les luttes actuelles ?
“Au gré des usages, la fraternité a signifié une chose et son contraire, instrument du révolutionnaire comme du fonctionnaire, de la victime comme du bourreau.” – Arthur Duhé.
Docteur en relations internationales (Université d’Oxford) et ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (ENS PSL), Arthur Duhé est chercheur postdoctoral (ANR Access ERC) à l’Université Paris 8. Depuis 2022, il a commencé un nouveau projet de recherche portant sur les images fraternelles dans les discours nationalistes, antinationalistes et internationalistes, de 1789 aux années 1970.
Il publie aux éditions Anamosa, dans la collection Le mot est faible, le titre : Fraternité.
La Fraternité, troisième terme de la devise républicaine, n’est pas de la même nature que les deux premiers. C’est une métaphore employée dans “des situations inadéquates” car elle rassemble des personnes qui ne sont pas des frères… Elle peut inclure mais aussi exclure -les non-frères, hiérarchiser (les petits frères). La fraternité a été tour à tour une illusion, une infantilisation (le cas de Réunion) et une exclusion -l’Algérie-.
“La colonisation était un déchirement, puisqu’elle supposait l’éloignement des frères de leur Mère-patrie, la France. […] Dans les anciennes colonies, la fraternité était infantilisante ; dans les nouvelles, elle excluait ces populations de la nation française.”
Comment qualifier « l’internationale réactionnaire » ? A quelle fraternité (raciste,…) doit-on la rattacher ?
Toutefois, la fraternité, c’est aussi la sororité, peut-être parmi les images les plus fortes de ce début de 21ème siècle (#MeToo, #GrèveFénimiste).
Arthur Duhé insiste sur la plasticité de la fraternité, sans cesse à produire de nouvelles images. Sa mise en retrait ne signifie nullement sa disparition. Cette capacité plastique lui permet de re.surgir là où on ne l’attend pas traçant « un autre chemin » !
“La fraternité et la sororité ne sont pas des valeurs qui guident nos combats, mais des outils à mobiliser dans nos luttes.”
Terrain Social, avec Arthur Duhé, plaide pour de nouveaux imaginaires fraternels !
Entretien par Hugues Chevarin.
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